Accueil » Kiosque » Manuscrit maçonnique de 1693

Manuscrit maçonnique de 1693

Fonds documentaire

Livres
Thème

Manuscrit du XVIIe siècle :

Constitutions de la noble et fameuse Corporation

Document

reproduit dans son intégralité 

Manuscrit maçonnique anglais de 1693 

en la possession de la York Lodge n° 236

Le journal Hiram (mai et juillet 1908) a fourni ce très curieux document maçonnique, dont la traduction a été faite par le Frère Teder, un des Maçons les plus instruits sur l’histoire de l’Ordre, dont figurent ci-dessous les propos d’introduction audit Manuscrit de 1693 :

…..Parmi tous les manuscrits anglais, dit M. Teder, nous avons choisi de préférence, pour être traduit et publié, celui de 1693, parce qu’il prouve d’une manière incontestable que, sous la dynastie protestante de Guillaume d’Orange, l’ancienne maçonnerie britannique continua d’être parfaitement catholique romaine.   

…..Il est vrai qu’en 1690 Guillaume d’Orange, initié par quelques maçons dissidents et rebelles, avait créé avec eux une maçonnerie spéciale à son usage particulier, dont les statuts, publiés en 1694, portèrent ce qui suit :

''Votre premier devoir est d’être fidèle à Dieu… De plus, vous devez être fidèles sujets de votre Roi… ''

La maçonnerie spéciale inféodée au protestantisme de Guillaume d’Orange biffait simplement la sainte Eglise, à laquelle les maçons avaient toujours été tenus de jurer fidélité. Mais nous possédons aussi la copie d’un manuscrit de 1704, établissant, sans réplique possible, que la maçonnerie ancienne, sous le régime protestant de la reine Anne, était toujours catholique romaine.

D’autre part, si nous nous reportons à la fondation de la maçonnerie moderne de 1717, – laquelle fut une simple reprise de la maçonnerie spéciale de Guillaume d’Orange,– nous que les constitutions qu’elle fit en 1723 prétendirent, sous la plume de clergyman Anderson, que les constitutions d’Edwin, en 926, commençaient par ces mots :

« Votre premier devoir est d’honorer Dieu sincèrement et d’observer les lois des Noachites… Vous devez être fidèles à votre roi sans trahison… »

En retranchant des constitutions d’Edwin la question de la sainte Eglise, Anderson voulait laisser croire aux naïfs que la maçonnerie de 1717 reprenait la tradition de 926. Or, dans le manuscrit de 1693, dont nous donnons ci-après la copie traduite, on peut voir, au contraire que les constitutions d’Edwin furent absolument catholiques romaines.

D’où il faut conclure que la maçonnerie ancienne était toujours, en 1717, catholique romaine ; tandis que la maçonnerie moderne de 1717, création aussi irrégulière que celle de la confrérie à laquelle avait été initié Guillaume d’Orange, ne justifia sa venue qu’en donnant un coup de ciseau dans les constitutions de 926 et ne fut en définitive, qu’une maçonnerie d’Etat inféodée à la dynastie usurpatrice et protestante de George 1er.

…..Après ce préambule, M. Teder passe au manuscrit de 1693 selon les parties essentielles qui suivent.

…..Que la Puissance du Père Céleste et la Sagesse de son Bienheureux Fils, par la bonté du Saint-Esprit, soient avec nous à notre commencement et nous donnent aussi la grâce de gouverner notre existence de manière que nous puissions atteindre les joies éternelles. Bons Frères et Compagnons. Notre intention est de vous dire comment et de quelle façon le corps de la Maçonnerie a commencé, et ensuite comment il advint qu’il fut connu de puissants Rois et dignes Princes et de beaucoup d’hommes respectables. Et à ceux qui savent entendre, nous proclamons le Mandement qu’il appartient à tout vrai Maçon de tenir en bonne foi, et, si vous y faites attention, vous reconnaîtrez qu’il est très honorable qu’il soit gardé par un corps respectable et par une science curieuse.

Il y a sept sciences qui n’en forment qu’une et qui sont comme il suit : La première est la Grammaire, qui enseigne à prononcer et parler correctement ; la seconde est la Logique, qui enseigne à discerner entre le vrai et le faux ; la troisième est la Rhétorique, qui apprend à parler en termes subtils ; la quatrième est la Musique, qui enseigne l’art du chant et la voix de la harpe et de l’orgue ; la cinquième est l’Arithmétique, qui enseigne à calculer, la sixième est la Géométrie, qui enseigne à mesurer la terre et autres choses parmi lesquelles se trouve la Maçonnerie ; la septième est l’Astronomie, qui enseigne le cours du soleil, de la lune et autres ornements des cieux. Ces sept sciences reposent sur une seule : la Géométrie, qui enseigne le partage, la mesure, la pondération et le poids de toutes sortes de choses sur la terre. Il n’y a pas un homme qui, attaché à telle ou telle science, ne travaille pas au moyen de quelque mesure, et ceci est Géométrie. Artisans et marchands dépendent de cette science, et spécialement les laboureurs et les cultivateurs, en ce qui regarde le blé, les semences, les vignobles, les plantations, etc. Ni en Grammaire, ni en Astronomie, ni en aucune autre science, un homme ne peut trouver une seule mesure sans la Géométrie, et c’est pourquoi cette science est plus noble que toutes les autres.

…..Et après la mort du roi David, le Temple qu’il avait commencé fut terminé par son fils Salomon qui, pour cette fin, demanda des Maçons dans diverses contrées, ce qui fit qu’il eut 80.000 ouvriers travaillant la pierre ; ils furent nommés Maçons et 3.300 d’entre eux furent choisis et élus Maîtres et gouverneurs des travaux. Et il y avait un roi appelé Hiram qui, affectionnant Salomon, lui donna des bois de charpente pour le travail : il avait un fils appelé Aymon et il était Maître en Géométrie et chef-Maître de tous les ouvriers, ainsi que Maître du travail de sculpture et de tout autre maçonnerie appartenant au Temple – comme cela est écrit dans le Ve chapitre des Rois, livre I. Et ledit Salomon confirma les Instructions et Coutumes que son père avait données aux Maçons. Et ceci fut l’illustre Corporation de la maçonnerie dans la terre d’Israël et la cité de Jérusalem, et dans beaucoup d’autres royaumes. D’admirables ouvriers allèrent à l’étranger, quelques-uns pour apprendre davantage le métier, d’autres pour l’enseigner. Et il arriva qu’il y eut un Maçon curieux appelé Minus Greneusis, qui avait été à la construction du Tempe de Salomon ; il se rendit en France, où il enseigna le métier de la Maçonnerie aux hommes de France. Et là il y en avait un de lignée royale de France, appelé Charles Martel, qui aimait beaucoup ce Minus Greneusis à cause de son métier ; il en adopta les Instructions et Coutumes, et, après, il fut, par la grâce de Dieu, élu roi de France. Quand il fut dans son royaume, il y installa beaucoup de Maçons qu’il mit au travail et comme il les chérissait, il leur donna, avec une bonne paye, les Instructions et Coutumes qu’il avait apprises lui-même d’autres Maçons ; en outre, il leur octroya une Charte, les autorisant à tenir une Assemblée tous les ans. Et ainsi vint le métier en France. L’Angleterre, durant ce temps, était sans Maçons – et ce fut ainsi jusqu’à l’époque de Saint-Albans.

…..Juste après la mort de Saint-Albans vinrent de grandes guerres en Angleterre entreprises par diverses nations, de sorte que la bonne règle de la Maçonnerie fut détruite jusqu’au temps d’Athelstan, lequel fut un illustre roi d’Angleterre. Ce roi établit  la paix dans la contrée, construisit plusieurs fameux édifices, tels qu’abbayes, châteaux, etc., et manifesta une grande affection pour les Maçons. Et il eut un fils appelé Edwin, lequel tint les maçons en plus haute estime encore que ne l’avait fait son père : il était versé dans la science de la géométrie et il fut ainsi conduit à communier avec eux pour apprendre leur métier. Il fut donc fait maçon et reçut de son père une Charte et une Commission autorisant la Corporation à tenir une fois par an une assemblée dans n’importe quelle partie du Royaume, afin que les Maçons pussent corriger entre eux les fautes et délits commis dans le métier. Et il organisa lui-même une assemblée à York, où il créa des Maçons, prescrivit des Instructions et enseigna la morale maçonnique, en ordonnant que cette règle serait toujours observée ; il donna ensuite à la corporation une Charte et une Commission, en décidant qu’elles continueraient de roi en roi. Lors de cette assemblée, il proclama que tout Maçon pouvait apporter les écrits en sa possession relatifs aux connaissances du métier, soit en Angleterre, soit dans toute autre contrée. Ces écrits furent réunis. Il y en avait en français, quelques-uns en grec, en latin, en anglais et autres langages. Le sens en fut trouvé, et Edwin ordonna qu’un livre serait fait pour établir comment le métier avait été découvert : il prescrivit que ce livre serait lu et expliqué à tout Maçon nouveau, ensuite qu’on ferait connaître à celui-ci les Instructions.

Depuis ce temps, les coutumes des Maçons ont été tenues et observées dans cette forme, du moins autant qu’elles pouvaient l’être par des hommes. En outre, dans plusieurs assemblées, et suivant les conseils des meilleurs maîtres et compagnons, diverses instructions furent ajoutées petit à petit aux précédentes. A présent, vous savez en détail comment cette noble et fameuse corporation de la Maçonnerie a été inventée, et comment, miraculeusement, elle a été conservée ; vous savez aussi combien elle a été affectionnée par les rois et les potentats depuis son commencement jusqu’à ce jour, et combien elle est encore aimée et tenue en haute estime par toutes sortes de personnes.  L’un des anciens prend le Livre, celui ou CELLE (sic) qui doit être fait Maçon pose les mains sur le Livre, et alors les Instructions sont données. Tout Maçon doit prendre attention à cela. Si vous vous sentez coupables d’aucune des fautes énumérées dans ces Instructions, efforcez-vous de vous amender : et spécialement vous qui pouvez être accusés, prenez bien soin d’observer les Instructions, car c’est un grand péril pour l’âme d’un homme que de se parjurer sur Le LIVRE.

« Le premier article de vos Instructions est que vous serez fidèles à Dieu et à la SAINTE EGLISE, et que vous n’emploierez ni hérésie ni erreur dans votre entendement.

« Secondement, que vous serez hommes liges fidèles au Roi sans aucune trahison, mais que vous la réparerez, si vous le pouvez, et que vous en avertirez le Roi ou son Conseil.

« Troisièmement, que vous serez sincères les uns envers les autres, c’est-à-dire envers les Maîtres et les Compagnons du corps de la Maçonnerie qui sont reconnus pour tels, et que vous serez pour eux ce que vous voudriez qu’ils fussent pour vous ; et aussi que chaque maçon fréquentera les Chambres et les Loges ou tous autres Conseils tenus maçonniquement.

« Quatrièmement, que vous serez fidèles au maître ou propriétaire que vous servirez, en faisant votre possible pour son avantage. « Cinquièmement, que vous appellerez tous les Maçons camarades ou frères, que vous ne leur donnerez pas un autre nom, et que vous ne séduirez pas la femme de votre camarade ni ne désirerez illégalement sa fille ou même sa servante.

« Sixièmement, que vous paierez exactement pour la table, la nourriture et la boisson, partout où vous prendrez pension. Telles sont les Instructions générales auxquelles sont assujettis les Maçons, aussi bien les Maîtres que les Compagnons.

…..A présent, je rappellerai les Instructions générales relatives à tout vrai Maître ou Compagnon :

« Premièrement, aucun Maître ou Compagnon ne doit accepter aucune tâche s’il ne se sent pas la capacité ni l’adresse de l’exécuter, afin que la Corporation ne soit pas sujette à la calomnie et que le propriétaire puisse être bien et fidèlement servi ; de plus, aucun Maître ne doit accepter aucun travail sans un salaire raisonnable, de manière que le propriétaire soit fidèlement servi pour son propre avantage et que les Maîtres et Compagnons aient une paye exacte et honnête, telle que l’exige la Corporation.

« De plus, aucun Maître ou Compagnon ne doit supplanter un camarade, c’est-à-dire que si celui-ci a du travail, il ne peut en être privé s’il est capable de l’achever. « De plus, aucun Maître ou Compagnon ne peut prendre un apprenti que pour sept ans, excepté si cet apprenti est de bonne naissance, capable et sain.

« De plus, aucun Maître et Compagnon ne peut être autorisé à faire un Maçon sans le consentement d’au moins cinq ou six de ses camarades ; et celui qui doit être fait Maçon doit être né libre, de bonne parenté, et non pas un serf, et être sain de corps, comme un homme doit l’être.

« De plus, aucun Maître ou Compagnon ne doit donner à exécuter le travail des propriétaires à ceux qui ont l’habitude de voyager ; et aucun maître ne doit accorder à aucun Compagnon plus de salaire que celui-ci n’en mérite, afin de de ne pas être trompé par les faux ouvriers.

« De plus, aucun Maçon ne doit se livrer au jeux de hasard ou autres jeux, afin que la Corporation ne soit pas calomniée.

« De plus, chaque Maître ou Compagnon doit se rendre à l’Assemblée si elle n’a pas lieu dans un rayon au-delà de 50 miles, et s’il a reçu avis d’assister à la récompense des Maîtres et Compagnons : s’il manque à ce devoir et si un rapport est fait à ce sujet, il doit se soumettre à l’arbitrage des Maîtres et Compagnons, et, si l’entente ne peut avoir lieu, il est tenu de se présenter devant l’Assemblée commune.

« De plus, aucun Maçon ne peut montrer aucune forme, équerre ou règle à aucun Maçon grossier (rough Mason), et ne doit, soit dans la Loge, soit au dehors, fixer ou poser aucune moulure qui ne soit de sa fabrication.

« De plus, chaque Maçon doit bien accueillir les camarades étrangers qui se présentent dans la contrée et les assister dans le travail, s’il le peut, c’est-à-dire que, s’il a des moulures à placer, il doit leur procurer du travail au moins pendant deux semaines et leur payer le salaire. S’il n’y a rien pour eux, alors il doit leur fournir de l’argent pour leur permettre de se rendre à la Loge voisine.

« Enfin, tous les Maçons doivent être exacts à leur travail, qu’il soit à la tâche ou à la journée et le mener fidèlement à bonne fin, s’ils reçoivent leur salaire comme ils doivent le recevoir. »

…..Ici, suit l’Instruction de l’Apprenti :

« Qu’il sera fidèle à Dieu et à la SAINTE EGLISE, au PRINCE, à son MAITRE et à DAME qu’il servira ; et qu’il ne volera ni ne dérobera les biens de son Maître ou de sa Dame, ni ne s’absentera de leur service, ni ne les quittera pour son plaisir de jour ou de nuit sans leur permission ; et qu’il ne commettra ni adultère ni fornication dans la maison de son Maître avec la femme de celui-ci, ou avec sa fille, sa servante, ou tout autre femme ; et qu’il tiendra secrètes toutes choses dites en Loge ou Chambre par tous Maçons, Compagnons ou Francs-Maçons, et qu’il n’emploiera aucun argument de désobéissance contre aucun Franc-Maçon, ni ne révèlera aucun secret au sujet duquel un différend aurait pu surgir entre Maçons, Compagnons ou Apprentis, mais qu’il se comportera toujours d’une manière respectueuse vis-à-vis de tous les Francs-Maçons qui sont des frères assermentés devant son Maître, et qu’il ne se livrera pas aux cartes ou autres jeux trompeurs et illégaux, ni ne fréquentera les tavernes ou brasseries où se font les dépenses inutiles, sans la permission de son Maître ou de quelque autre Franc-Maçon ; et qu’il ne commettra pas d’adultère dans la maison d’aucun homme où il travaille ou reçoit nourriture ; et qu’il ne dérobera ni ne volera aucuns biens d’aucune personne, ni ne causera volontairement aucun préjudice ou scandale durant son apprentissage, soit chez son Maître ou sa Dame, soit chez aucun autre Franc-Maçon ; et qu’il doit résister de toutes ses forces aux mauvaises impulsions et en informer, le plus tôt possible, son dit Maître ou quelque autre Franc-Maçon. »

Telle sont les Constitutions de la noble et fameuse corporation appelée Maçonnerie, établies et à présent pratiquées par les meilleurs Maîtres et Compagnons, pour diriger et guider tous ceux qui emploient ladite Corporation.

Scripted p. me vicesimo tertio die Octobris, anno regni Regis et Reginae Gulielmy et Mary quinto annoque Domini 1693.

Mark Kypling.

Les noms de la Loge : William Simpson, Christophe Thompson, Anthony Horsman, Christopher Gill.  

Me Isaac Brent, surveillant de la Loge :

« Nous soussignés, nous avons comparé la copie qui précède avec le Document original en la possession de la York Lodge n° 236, document ayant appartenu autrefois à l’ancienne Grande Loge de toute l’Angleterre siégeant dans la cité d’York, et par le présent acte, nous certifions que cette copie est exacte et fidèle.

« William Cowling, P.M. et Trésorier, 236

« Ralph L. Davison, P.M., 236. »

« York, 13 mai 1870 »

Le document original est un rouleau de parchemin légèrement mutilé, portant la mention suivante : « N° 4-1693. Le F\ Geo. Walker de Wetherby, à la Grande Loge d’York. »  

(Document déposé sur le site du Rite Ecossais Primitif en juin 2014)