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Le Secret des Loges

Morceaux de textes choisis

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 Travail 

Une des obligations majeures du Franc-Maçon       

 Thème 

« Histoire d’un secret »

ou le Secret des Loges et ses Mystères

 Auteur

Elisabeth Mutel – Orient de Paris, août 2014………

A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers,

      La Franc-Maçonnerie fournit aux Initiés des repères par des fils conducteurs et incitatifs à la réflexion,  qu’ils construisent eux-mêmes à partir d’une éthique conçue sur certaines Vertus et des Valeurs choisies. Le Maçon assoie sa détermination dictée par la Sagesse qui demeure présente en son esprit, ayant recours à la Beauté qui lui procure une source d’inspiration, et dans la Force qui appuie ses efforts vers le Bien.

       En cela, tous les Maçons suivent les ‘‘interpellations’’ puisées dans le Rituel qui devient à la fois suggestif et force de proposition. Ainsi, à l’unisson tête et cœur des participants aux Travaux en Loge, tous se fondent en une Chaîne fraternelle, dans laquelle les facultés réceptives de chacun s’abandonnent volontiers à la séduction d’un vocabulaire hors du commun, hors normes établies, parce qu’impraticable dans l’espace public. Le Rituel prend la forme de commandements, dans lesquels abstraction et/ou contraction des mots augmentés de figures et allégories, soit de symboles, associés à leur déclinaison et conjugaison, prennent une signification habillée d’un voile ésotérique, qui fascine l’esprit et les sens jusqu’à la transcendance.

      Pourtant, parmi tous ces vocables,  il en est un qui sent le SOUFRE mais aussi tous les parfums humés en tous lieux, qu’ils soient isolés ou préservés voire réservés à une certaine élite, qu’il s’agisse de domaines répandus et largement fréquentés, parce qu’ UN mot a traversé les siècles laissant son empreinte dans les œuvres de nombreux écrivains, philosophes, scientifiques, des plus érudits jusqu’aux copistes, et apposant sa marque mystérieuse dans les écritures d’une spiritualité affirmée sans commune mesure avec les textes les plus mercantiles.  Dans sa traversée bravant toute frontière terrestre et tout obstacle linguistique, le vocable en question est le Secret.

Quel est le sens du mot secret ?   Qui sert-il,  et dans quel but ?

   .    Ce mot nous vient du latin secretus : séparer, secret, et de secernere : écarter. Le dictionnaire précise par ailleurs : ‘‘Qui n’est connu que d’un nombre limité de personnes, qui est ou doit être caché des autres, du public ». Hormis le mystère, je rajouterai que secret nous renvoie à l’exercice d’une fonction, celle de secrétaire, dont le titre malheureusement tend à disparaître pour être remplacé par assistant, mais reste toutefois encore en usage dans les instances du Pouvoir politique. Le secrétaire dans son état et ses attributions est appelé à taire les secrets, à les garder celés dans un mobilier dit ‘‘secrétaire’’ faits de tiroirs secrets dans lequel sont enfermés les dossiers confidentiels. En des siècles plus reculés, les dossiers secrets étaient scellés d’un sceau de cire que seul le destinataire ou l’utilisateur du pli pouvait ôter. De nos jours encore, certaines professions font usage d’un sceau à l’exemple des notaires pour authentifier la validité d’un acte juridique. Pour non seulement être justifié mais pour durer dans le temps, le secret a usé d’effets d’annonces pour la promotion d’actions profitables à leur créateur ou à un groupement d’intérêt. On assiste aujourd’hui comme hier à des dossiers et entretiens placés dans le secret de l’instruction où se croisent convoitise, complot et trahison, prédiction et bien naturellement politique articulée autour d’un humanisme brandi par certaines Loges, qui s’interposent en médiateurs et en  »sentinelles de la République ». Nous savons déjà que les sentinelles sont aussi des veilleurs et des surveillants en alerte sur toute intrusion en quelque lieu protégé ; ainsi que nous l’avons dit en d’autres études les Maçons font appel à des Officiers Couvreurs, Thuileurs, dénommés au REP « Frère Terrible ».

      Depuis des siècles, le secret traîne une cohorte de suspicions et de soupçons et pour être plus porteur de son contenu et de son enveloppe, il s’entoure d’une aura de mystères soigneusement entretenus qui suscitent une curiosité inaccessible au plus grand nombre, parce que réservée à peu d’élus. Pour rendre captif un public interrogatif de l’inconnu, un stratège vieux comme le monde met en place un jeu de scènes qui a pour effet de faire naître des réactions de toutes natures dont, pour ne citer que quelques-unes, méfiance, défiance, protection et défense, connivence et intrigues,… qui ont résisté à l’usure du temps.

   .   Dans le milieu profane,  le secret se complait dans un terreau favorable au maintien du prestige de son auteur et produit une fascination chez celui qui en est bien évidemment exclu. Toutefois, certains sont des secrets nécessaires. Ainsi, le médecin doit-il révéler ses conclusions à un malade non préparé à accepter un pronostic vital bien compromis ou dévoiler à la famille le contenu du dossier relevant du secret médical ? Le secret pour raison d’Etat parfois s’avère indispensable pour la sauvegarde de la paix civile dans un territoire fragilisé par des adeptes prompts aux mouvements de révoltes ou aux complots contre le Gouvernement en place. Ce même secret-défense peut servir unilatéralement l’intérêt collectif comme l’intérêt privé de ses protagonistes. Nous pourrions en citer bien d’autres, secrets d’alcôve, secrets de polichinelle, archives secrètes, code secret, services secrets et ses agents secrets, vote à bulletin secret,… l’expression la plus attrayante d’entre toutes étant le « Jardin secret ». Ce mot a gagné en effet toutes les générations atteignant les oreilles des jeunes enfants en quête de confidence jusqu’aux âmes vaillantes des branches d’activités et des Ordres professionnels, qui n’ont eu de cesse, depuis la Féodalité, que de protéger leur profession et leurs découvertes. Ce chapitre sur les imbrications du secret est incontournable, ne serait-ce que pour étalonner ce mot qui sert des sujets bien souvent méprisables et dotés d’une pauvreté malgré des usages innombrables mais inavouables, qu’il est donc plus simple et radical de masquer derrière le secret, ce qui évite par ailleurs d’en dévoiler la teneur.

Le Secret des Loges

La Franc-Maçonnerie n’a pas échappé à cette disposition ayant pour elle l’attrait du mystère autour de rituels singuliers et parfois mélo-dramatiques. Les Loges dépositaires desdits secrets sont bousculées, tourmentées par ceux –démunis ou puissants– qui veulent s’en emparer, et ceci depuis le Moyen-âge. La société, en milieu urbain, assimilait la Loge à un salon de bon ton (à l’exemple du Rotary, Lions-Club réservés de nos jours à une certaine élite argentée), une sorte de club ou de cercle dans lequel se concertaient, à l’abri des oreilles indiscrètes les Clergymen (ecclésiastiques), les Lords et la Gentry (noblesse et petite noblesse), les Gentlemen (notables et intellectuels), enfin toutes les personnes dignes d’être aptes à garder le secret.

 .  .   Et au commencement, était le Banquet. Face à son succès, le siège des délibérations du secret trouve asile dans les auberges et tavernes où se tiennent les séances réunissant les Frères en un tour de table. Ils adoptent alors les Travaux de Table, dits Rituels de Table. Célébrés dans la convivialité, des Santés et des Chants clôturaient les assemblées. Conduit par ces éminents penseurs que sont les Maîtres du Secret, le centre de décisions le plus connu en Angleterre en 1648 était l’Invisible College d’Oxford, lequel a produit en 1660 la Royal Society à Londres, cette dernière ayant été fondée par un Jacobite proche des rois Charles Ier et Charles II, Sir Robert MorayPar la suite les fameuses Constitutions d’Anderson, dans leur version de 1723, révèlent le Chant du Maître ou l’Histoire de la Maçonnerie dont le chœur s’exprime, à la fin des Travaux de Table, comme suit :

       Qui peut révéler l’Art royal,  ou chanter ses secrets en un chant ?  Ils sont gardés de façon sûre dans le cœur du MaçonEt appartiennent à l’ancienne Loge.

Quant au chœur du Chant des Surveillants, ou une autre histoire de la Maçonnerie, il nous est dit ceci :

       Leurs secrets, jusqu’ici jamais révélés aux étrangers,  Seront conservés par les Maçons Libres,  Et à l’ancienne Loge seulement seront dévoilés,

       Parce qu’ils sont tenus dans le cœur des Maçons    Par les Frères de l’Art royal.

   . Des incantations prennent des airs d’assignations délivrées  aux Francs-Maçons pour les sensibiliser à un scrupuleux usage du Secret. Pour traduire cette formule, nous reprenons la première phrase du fameux Discours du Chevalier de Ramsay aux répercussions fracassantes dans le milieu maçonnique du Royaume de France, dans lequel ce Jacobite écrit en 1737 ce qui suit :

« La noble ardeur que vous montrez, Messieurs, pour entrer dans le très noble et très illustre Ordre des francs-maçons, est une preuve certaine que vous possédez déjà toutes les qualités nécessaires pour en devenir les membres, c’est-à-dire l’Humanité, la Morale pure, le Secret inviolable et le goût des beaux-arts. »

A la fin de ce même discours, l’auteur rajoute « …. Depuis ce temps-là, la Grande-Bretagne fut le siège de notre Ordre, la conservatrice de nos Lois et la dépositaire de nos Secrets. »

Les offensives contre le secret maçonnique.

       A un obscurantisme certain, s’opposent des allégations exposées telles des chefs d’accusation. Nous citons en 1742 l’abbé Calabre Pérau, dans son manifeste ‘‘Ordre des Francs-Maçons trahi et le secret des Mopses révélé’’, qui préfère se taire sur les mystères que d’en parler mal à propos. Il s’exprime ainsi : « Je n’ignore pas qu’il court un bruit vague parmi les Francs-Maçons, touchant un certain Ordre, qu’ils nomment les Ecossais, supérieur à ce que l’on prétend aux Francs-Maçons ordinaires et qui ont leur secret à part ».  Cinq décennies après, la descente aux enfers se poursuit avec l’abbé François Lefranc, farouche adversaire des Lumières, qui dénonce l’Ordre sous ‘‘Le voile levé pour les curieux, ou le secret de la révolution de France révélé à l’aide de la franc-maçonnerie’’. Par la suite, ‘‘Les Mémoires pour servir à l’histoire du jacobinisme’’ par un troisième abbé, Augustin Barruel, associent la Franc-Maçonnerie aux tentatives de complot ou de luttes frontales envers les Institutions en place, qu’elles soient politiques ou religieuses, dans lesquelles se mêlent philosophes et hommes de l’art dont les musiciens compositeurs. Enfin, l’affaire Léo Taxil et son ouvrage ‘‘La Franc-Maçonnerie dévoilée et expliquée’’, dans lequel l’imposteur révèle dans les tout premières pages de son ouvrage le fonctionnement « d’une association qualifiée de centre international de conspiration », en prenant grand soin de la discréditer. L’affaire Dreyfus et le complot judéo-maçonnique ne seront qu’une démonstration supplémentaire d’une thèse où se mêlent antisémitisme et antimaçonisme.

  . .  Sont opérées d’autres publications, sans doute aux fins de révéler et d’étaler au grand jour les activités des Loges, selon une classification intitulée « divulgations des Mystères et Secrets maçonniques », parmi lesquelles :

  • The Grand Mystery of Free Masons discovered (1724), 
  • The Whole Institution of Free Masons opened (1725),
  • The Grand Mystery laid open (1726),
  • The Masonry Dissected de Samuel Pritchard (1730),
  • Le Sceau rompu (1745),
  • The Three Distinct Knocks (1760).

Malgré un esprit de ‘‘dénonciation’’ donné aux titres ci-dessus, de tels ouvrages présentent l’avantage et l’intérêt avec le temps de rapporter plus ou moins exhaustivement aux Francs-Maçons d’aujourd’hui de précieuses informations quant aux usages, décors, catéchismes et iconographie de la Franc-Maçonnerie d’autrefois, traduits notamment par Gustave Bord, antimaçon notoire mais auteur averti et pertinent quant aux Usages des Loges maçonniques. Le XXe siècle n’est pas en reste.  Sous le régime de Vichy, la Franc-Maçonnerie est à jamais marquée du sceau des Sociétés secrètes, dont l’un des premiers promoteurs de cette image était Adrien Marquet qui s’exprimait comme suit :

« Des organisations à caractère occulte se sont instituées ou développées en France, sous forme d’associations, soit même de simples groupements de fait. Aucun gouvernement ne peut admettre l’existence de groupements poursuivant une activité clandestine ou secrète… Il apparaît donc indispensable de dissoudre tous les groupements ou associations à caractère secret et d’en interdire la reconstitution… ».

      De telles dispositions placent les Frères dans la tourmente, selon l’expression consacrée par les médias de l’époque et bien relayée par le septième Art dans une production cinématographique de 1943 ‘‘Forces occultes’’, à vocation de propagande antimaçonnique. Au fil des années, d’autres affaires de scandales à sensation, dans l’esprit de celle des Fiches sous la IIIe République, seront couronnées par le long combat de la soutane contre le tablier, et vice versa les Francs-Maçons affichent ouvertement leur anticléricalisme, et par la suite leurs options et leur adhésion à un parti politique.

Les emprunteurs ou les adeptes du Secret

         Il convient de rappeler que depuis l’affaire de l’Ordre du Temple associée à tort à la Franc-Maçonnerie, les Loges et les Frères sont considérés, dans une telle appartenance, comme membres d’une Confrérie ou Société secrète.  En son giron, rituels et cérémonies étaient donc qualifiés d’activités dites secrètes, faisant allusion au procès des Templiers, dont 217 Chevaliers reconnurent l’existence d’un Cercle Intérieur secret, et c’est précisément ce qui leur était reproché. Le Grand Maître Robert Ambelain rappelle que les Mystères dont s’entourait le Temple étaient comparés au Secret de la Franc-Maçonnerie qui consistait dans l’interdiction de révéler la cérémonie de Réception dans l’Ordre. Le Grand Maître cite ses sources : « selon M. Lobet, la Franc-Maçonnerie aurait semé la confusion dans les esprits en revendiquant les Templiers pour ancêtres et en créant des rapprochements artificiels entre le Temple et la Loge ».  On retrouve d’ailleurs des similitudes entre l’assassinat de l’Architecte par les trois mauvais Compagnons qui ne seraient autres que les trois protagonistes de la destruction de l’Ordre du Temple : Philippe le Bel, Guillaume de Nogaret et le pape Clément V qui ne manque pas de déclarer certains hommes, et les plus puissants, en état d’excommunication. Outre le secret des Templiers, dont certains Chevaliers rescapés et réfugiés en Ecosse seraient les pionniers de la première société secrète outre-Manche, et en d’autres lieux en Europe (Malte, Portugal,… et Sion en France), nous voyons apparaître d’autres secrets, dont celui des cathédrales et des pyramides qui a donné titre à certains ouvrages.

   C’est au Siècle des Lumières que surgissent, dans une société où les hommes sont à la recherche d’une spiritualité, que l’Eglise de Rome ne leur offre plus, de nouveaux prescripteurs. Ces derniers souscrivent à une philosophie qui va leur ouvrir les portes des salons, des hôtels particuliers et ensuite des Loges par des ouvrages intitulés : pensées essais et lettres, traités, méthodes, discours, à l’image des Sages de l’Antiquité, des philosophes et hommes de foi, tels que Blaise Pascal et ses Pensées, saint Augustin et ses Confessions. Précédemment en ce XVIIIe siècle, Voltaire fera partie des Initiés admis au Secret des Loges.

 .    Nous avons évoqué les Forces secrètes, les Forces occultes, les sociétés secrètes qui conduisent aux sectes, au sein desquelles on trouve les adeptes du silence et les partisans d’activités dissimulées. Mais il est question ici de secte initiatique, pour reprendre strictement le propos de Jean-Pierre Bayard qui rajoute ceci :

« Les francs-maçons se taisent, fidèles à la loi du silence en vigueur chez les pythagoriciens et que l’on retrouve dans toutes les sectes initiatiques. Ils se taisent par pudeur, par respect, ne voulant pas révéler leurs mystères à ceux qui ne sont pas préparés à le recevoir. »

J.P. Bayard nous rappelle que les rituels insistent sur la valeur et la puissance du secret pendant que René Guénon précise inopinément :

« Les véritables mystères se défendent d’eux-mêmes contre toute curiosité profane, leur nature même les garantit contre toute atteinte de la sottise humaine, non moins que des puissances d’illusion que l’on peut qualifier de diaboliques »,

tant il est vrai que la Franc-Maçonnerie soit encore de nos jours diabolisée par le grand public, spectateur de l’implication des Loges dans le cadre des affaires politiques, économiques et sociales, celles-ci étant perçues comme une émanation syndicale ou lobbying.

         De la sorte, en de nombreux esprits, l’Institution en général se trouve directement concernée, si bien qu’un grand nombre de Loges et d’Obédiences sont frappées d’une telle sanction, dont quelques-unes d’entre elles, certes consternées, sont fermement résolues à se DEMARQUER d’une telle renommée désastreuse et dévastatrice. Certains reconnaissent aisément l’implication de certains Frères dans des actions ô combien bénéfiques à l’humanité, mais infiniment moins pertinentes que certaines affaires de grands chantiers, de BTP, et immobilières en France (dont Urba-Gracco, Sagès,…) ou économiques ici et ailleurs, d’une portée aux intérêts financiers qui ont défrayé les chroniques pour conclure à la condamnation d’hommes politiques francs-maçons. Les média ont parfaitement pris le relai pour ‘’dynamiter’’ la Franc-Maçonnerie, allant jusqu’à user d’une vaste propagande par tous moyens, presse et scènes rituelles par vidéo.

       Nombreux sont les profanes pour qui la Franc-Maçonnerie demeure une secte, terme sur lequel nous ne nous étendrons pas, tant le rapprochement révèle une méprise la plus parfaite. Les Francs-Maçons le savent bien, ne serait-ce qu’en considérant le parcours et les délais nécessaires pour être acceptés et introduits en Loge, autant qu’une rupture des liens sans condition ni délai de prévenance est possible pour une sortie sans difficulté. Toutefois, nous assistons depuis les années 2022 et 2023 à une méthode de recrutement permettant aux Profanes de présenter leur candidature spontanée par la voie internet pour être acceptés dans une Obédience qui serait la seule à proposer une telle formule. C’est celle-là même qui divulgue en vidéo sur la toile la cérémonie d’Initiation au Grade d’Apprenti. Enfin, est-il utile de rappeler ici que les Maçons sont des Hommes libres… ?

  …  Antérieurement apparentée aux Forces dites obscures, surgissent d’autres Formations parallèles à la Franc-Maçonnerie, qui revendiquent depuis des siècles l’exercice d’un enseignement des sciences rapprochées de l’occultisme qui seraient délivrées par une société savante ésotérique et universelle, et donc contraire à une forme exotérique. Cette association d’idée n’est pas totalement fausse dès lors que résonnent, derrière les vocations savantes, secrètes et occultes :

  • l’ésotérisme qui nous conduit à Pythagore de Samos, Schwaller de Lubicz, Stanislas de Guaïta, Julius Evola, Goethe, Papus, Pic de la Mirandole, … ;
  • l’hermétisme qui nous renvoie au mythique Hermès Trismégiste (le trois fois grand : roi, législateur et prêtre) et sa Table d’Emeraude, sans omettre les deux Grands Maîtres : Giordano Bruno et Dante ;
  • l’alchimie et les œuvres de Fulcanelli, comte de Cagliostro, Nicolas Flamel, … ;
  • la mystique et Emanuel Swedenborg, Jakob Böhme, … ;
  • et d’autres sciences, telles la magie, l’astrologie, etc. ;

Et naturellement les Initiés sont invités à lire les œuvres des grands précurseurs Maîtres Spirituels, dont Lanza del Vasto, Teilhard de Chardin, Edouard Schuré, Krishnamurti, mais aussi un grand nombre de nos contemporains, parmi lesquels nous pouvons bien citer Constant Chevillon et Robert Ambelain, le dernier Grand Maître du XXe siècle qui a touché, avec quelques autres Grands Dignitaires, à la Kabbale et aux Rose-Croix.

  ..  S’agissant des Rose-Croix, nos Rituels précisent ce qui suit :  ‘‘Rosen, mot hébreu qui vient du suppôt linguistique rôz : SECRETS (rosah)’’. Et pour être exhaustifs sur le mot ‘‘occulte’’, nous reprenons la définition donnée par Papus (dont son fils, Philippe Encausse, était un de ceux proches de R. Ambelain) en trois séquences :

  • scientia occulta : science cachée
  • scientia occultari : science du caché
  • scientia occultans : science qui cache ce qu’elle a découvert avec ses divisions en théurgie, alchimie et magie.

       Depuis les temps modernes, un autre qualificatif est employé pour permettre à la Franc-Maçonnerie de ne point se dérober au regard du monde profane et se distinguer du secteur marchand. En effet, quelques Maçons d’aujourd’hui se disent appartenir à une Société non pas secrète mais discrète,…  Si effectivement la Franc-Maçonnerie n’a jamais dissimulé totalement sa réalité, certains Maçons en revanche font appel à un langage approximatif pour se définir eux-mêmes sur les réseaux sociaux et entretenir une image de promotion du pouvoir, qui indéniablement est leur meilleur supporteur sur la scène publique.

       Sans discréditer totalement cet adjectif, il y a lieu de privilégier bien davantage une autre visibilité de notre noble Institution qui n’est pas une structure clandestine, cachée ou secrète et a fortiori pas davantage discrète. Pourquoi n’est-elle pas tout ceci ? Simplement parce qu’elle est un Ordre, à l’exemple de l’Ordre des Médecins, l’Ordre des Architectes, où seuls Médecins et Architectes sont admis au sein de leur Ordre respectif, dans le respect de leurs Statuts et de leurs Règlements.  L’Ordre Maçonnique Jacobite applique des règles comparables. Sans discrétion, usant même d’une publicité légale (celle des Journaux Officiels), il ne peut être donc tenu pour discret.  Ainsi officiellement institué et constitué, étant déclaré Ordre Initiatique, à l’évidence non marchand ou professionnel, il n’admet en son giron que les Initiés qui font usage des Rituels de Tradition écossaise dans leurs actes, comportements et propos, dont ils n’ont pas à référer, pas plus qu’à les justifier dans le monde profane. Les choses sont aussi simples que cela.

            Parallèlement et conformément aux Rituels du REP, les Initiés dûment assermentés sont tenus au secret de leurs travaux et de leurs délibérations qu’ils n’ont pas vocation à brandir sur la voie publique, où d’ailleurs les profanes n’entendraient rien à leur propos ! Pour ma part, je n’émets aucune réserve dans la révélation de mon appartenance à la Franc-Maçonnerie, y compris et surtout à la Grande Loge Française Rite Ecossais Primitif, sans pour autant dévoiler certaines Instructions qui ne seraient pas audibles par les Profanes. Cependant, une stricte obligation de discrétion s’impose aux Francs-Maçons, celle de ne pas révéler le nom et l’appartenance à la Franc-Maçonnerie des Frères et Sœurs que nous côtoyons et qui nous entourent. Dès lors, je ne suis NI dans une position secrète, pas plus que discrète et réservée, SINON je serai en pleine contradiction avec la production de documents bien choisis, dont celui-ci, qui figurent sur le site internet de notre Grande Loge. En revanche, il est clair que je me sers délibérément de certains Travaux, pour transmettre un message ciblé et traduit en langage accessible au plus grand nombre, que les lecteurs soient initiés ou profanes. Par ailleurs, il est patent que je n’ai aucune réserve à employer, dès lors que je suis libre sans besoin de me cacher,  que je ne suis pas clandestine,  et à ce titre  je n’ai aucun motif à taire mon appartenance à cette Grande Loge.

Revenons sur l’essence du secret des Loges

         En fait aucun lien sémantique ne peut associer les secrets profanes, professionnels ou rattachés à un corps de métier, au secret maçonnique, tant leur finalité à chacun est disparate, éloignée, incomparable,…, pas même parallèle et plus généralement sans aucun rapport commun.

            En d’autres termes : ‘‘Le secret maçonnique est la recherche de la connaissance qui possède un caractère intrinsèque et indivisible. Le secret est l’essence même de l’Initiation. Il est cette sagesse de la profondeur qui dépasse toutes les limites de la science, de la philosophie, ou de la religion’’. Cette définition qui n’est autre que celle de Jean-Pierre Bayard nous renvoie à la Loge et aux Travaux dans le Temple. En fait que nous dit J.P. Bayard, si ce n’est de nous reporter à la lecture de nos Rituels qui ne posent aucune frontière (dépassement des limites), où sont permises toutes les investigations littéraires : de la plus pure sapience qui s’appuie sur la première des trois Grandes Lumières de la Franc-Maçonnerie (la Bible), jusqu’aux légendes et à la mythologie, des arts aux sciences (dont celle de la Géométrie) en passant par la symbolique, et bien sûr par la Fraternité et son indivisibilité. Par conséquent, nous pouvons affirmer que notre Secret part de certaines lignes directrices que les profanes ne peuvent qu’ignorer, non pas en tant qu’œuvre mais en tant que source de conversion pour un mode de réaction. En fait le secret pourrait être saisissable à tous, mais encore faudrait-il que les Profanes soient en capacité de relever, seuls, les grandes idées prometteuses d’une réflexion, pour mieux écarter tous propos et s’éloigner des agissements qui sonnent le glas des mauvais Compagnons.

         Sans chercher à revenir davantage sur l’impossible discrétion de la Franc-Maçonnerie ne serait-ce que par la profusion d’ouvrages maçonniques dans les rayons des librairies, force est de constater que ceux-ci n’attirent qu’attention des Initiés en quête de toute forme d’expression. Parfois, se manifeste un regard intrigué posé par des Profanes inquisiteurs, en souffrance d’une mise à l’écart, et seulement soucieux de percer le voile hermétique de nos activités, soupçonnées de sectarisme et d’occultisme le plus extravagant. Toutefois, le Franc-Maçon, qui lui feuillette minutieusement les nouveaux livres et magazines parus, restera passif sur le regard oblique du passant, vraisemblablement peu enclin à recevoir un éclairage susceptible de lui souffler une autre vision de la Franc-Maçonnerie. N’étant pas appelé à des manœuvres de prosélytisme, donc restant discret, l’Initié garde le silence et se met en réserve pour choisir l’ouvrage qui répondra à ses interrogations.  Effectivement, en ce cas précis le Maçon sera discret et réservé.

   ..  S’il n’est point question ici de divulguer le secret des Loges, nous observons certaines règles fondatrices dans l’expression orale comme celle écrite. Tout au long de cet exposé, un usage apparaît clairement parce que constant dans toutes les formes de locution, et précisément pour cette raison, il finit par être ignoré et se fondre dans le langage pour ne plus susciter aucune attention ni particularité.

      L’écrivain dispose de formules pour accéder à la mise en exergue des mots et exprimer une pensée dont le lecteur prendra connaissance à sa réelle valeur intrinsèque, ou qu’il traduira selon une vision qui lui sera totalement personnelle et différente de celle de son auteur. Quant à l’orateur, il expose son discours, selon des dispositions appropriées à la ponctuation d’intonations et d’accents sans doute plus incisifs ou percutants qu’à l’écrit, ne laissant pas à son auditoire de temps à la réflexion puisqu’il est dans une expression orale ininterrompue. Pour ce faire, l’un et l’autre, retiennent des mots assortis de constantes et de variables. Les constantes font appel à la singularité ou à la pluralité..  Des lignes qui précèdent, nous constatons l’emploi systématique de mots pris au singulier, tel que ésotérisme, occultisme, obscurantisme, hermétisme, initiation, magie, alchimie, sagesse et sapience, beauté, force,… ET secret. De plus, ces mêmes mots sont précédés de l’article défini. Ceci est un premier constat.

      L’emploi de ces mots,  comme tous les vocables attachés à notre Science peuvent parfaitement être utilisables sous la forme plurielle et indéfinie.  Pour pallier ces difficultés d’expression écrite, de nouvelles formes sont en usage, avec notamment le soulignement, les caractères gras, écriture italique et ou en lettres capitales, et avec des configurations graphiques (centrage, encadré, retrait,…), sans exclure bien sûr les mots dont la première lettre est une majuscule, conférant aux mots une qualité de nom propre à l’enseignement initiatique. C’est ainsi que les Francs-Maçons ont eux aussi leurs usages, tant à l’écrit qu’à l’oral.

     En deuxième constat, nous remarquons que certains mots sont déclinés systématiquement au pluriel et indifféremment sous la forme définie, tels : Les Mystères, alors que ce même mot est indéterminé quand nous affirmons que le Maçon est initié aux Mystères des Nombres.  En revanche, certains mots dont celui de secret est systématiquement employé de façon définie tant au singulier qu’au pluriel. C’est pourquoi nous disons LE Secret des Loges, LES Secrets de la Franche-Maçonnerie, LES Secrets des Maçons,… mais il n’est jamais question d’un secret indéterminé ou indéfini. Dans certains cas, quelques-uns de ces mots seront précédés d’un article possessif, comme ils donneront une forme qualificative à d’autres vocables par l’adjonction d’un adjectif, tel que nous les rencontrons à l’exemple de « lieu secret ».

         Ainsi, nous faisons appel à toutes les nuances possibles pour donner aux mots une signification, une frontière, une priorité et une valeur connues des seuls Initiés.  Afin d’illustrer notre propos et toujours sans trahir nos Secrets, nous reprenons ci-après quelques vocables ci-avant évoqués pour marquer un emprunt, une exception, une différenciation entre le même mot selon les circonstances. Aux sciences multiples répertoriées ci-avant, la Franc-Maçonnerie est UNE science sans exclusive. Pris au singulier, Mystère est à distinguer de sa forme plurielle pour associer le mot et isoler sa valeur unique attachée à l’Initiation : elle aussi une et indivisible du Mystère. Et puisqu’elle est une, elle est exceptionnelle. Mystère peut donc être pris au singulier, quand il est particulier parce que LE secret qui accompagne l’Initiation est unique. Le mot Mystère, dans sa forme plurielle et définie, est à rapprocher de Cérémonies et célébrations rituelles parce que celles-ci sont multiples, tout comme les Mystères d’Eleusis ont leurs cérémonies mystérieuses, qui livrent le culte rendu à Déméter et aux Dieux de l’Olympe, alors que nous parlerons du Mythe d’Orphée comme du Mythe du Temple du roi Salomon.

      Mais tout ceci n’est que la face pittoresque (nous pourrions dire la face cachée) et artificiellement commentée du Travail en Loge,  où résident le véritable Secret et les Mystères de la Franche-Maçonnerie. Suggérés par le Rite vécu par les seuls Initiés, sans aucune rencontre fortuite ni découverte utopiste, et ceci par la magie de tous les symboles associés, Secret et Mystères s’enchaînent et se succèdent les uns les autres. Nous pourrions parler à l’infini des nuances de l’écriture, comme le Rite et le rite, Colonnes et colonnes, etc., qui donnent des significations différentes.

     .  Enfin, le Secret et les Mystères que procurent l’Initiation, et par la suite chaque Réception à un Grade, sont sans nombre et sans limite, parce qu’ils sont exposés sans être pleinement révélés à celui qui ne va pas les chercher. De l’Apprenti au Maître le plus éclairé, le Rite et ses Rituels, inaltérables, universels et démystifiés, leur apparaîtront de fait purs et limpides. Mais, et c’est là le plus important, ces arcanes resteront attachés au domaine de la sacralisation du Temple qui est le creuset des Travaux maçonniques réservés aux Initiés.

       Et… les Hommes ont créé divers langages, celui des Signes, des Fleurs, des couleurs, des pierres précieuses, des pierres sacrées et leur message,… jusqu’à toutes formes d’expression par les Arts. Comme les amoureux ou les enfants dont nous soutenons que la Vérité sort de leur bouche, nous pouvons affirmer que les Maçons ont, eux aussi, leur langage incompréhensible et fermé aux Profanes. J’ouvre une parenthèse à la suite d’une interprétation de mon fils Michel, dubitatif sur une épée suspendue en éléments de décoration intérieure, qui avait surpris une de mes conversations au cours de laquelle je faisais allusion aux ‘‘capitations’’. Saisissant son amie par téléphone, il lui avoue : ‘‘… ma mère est dangereuse, elle veut décapiter des gens…’’ ; comme le passant à l’oreille distraite, je m’écarte discrètement pour sourire aisément de sa confusion !

  . .  Et… l’Art royal prend toute sa dimension chez l’homme qui conçoit son existence sur la Connaissance, à la recherche de la Vérité. Cela implique que tout mystère d’essence divine ou spirituelle soit rendu accessible aux Initiés, alors que Savoir et Connaissance d’essence temporelle restent réservés et incomplets, ce qui place par ailleurs le Maçon sur la voie initiatique d’une recherche continue et jamais achevée.

       Et… le Secret… ? … mais … l’Initié sait où le chercher … !

(travail déposé sur le site en août 2014)